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Maintenant qu’a fait l’Église ? A-t-elle répondu à l’attente des peuples ? Quelle a été, sur l’économie des biens, son principe, sa méthode ? Comment a-t-elle compris le rôle de la richesse, les lois de sa production, de sa distribution, le rapport du travail au capital, le fonctionnement de la propriété ? Sur ces points essentiels l’Église, développant l’idée chrétienne, a-t-elle produit une théorie juridique, une science morale ? Pouvait-elle en produire une ?

Nous connaissons la réponse.

Fidèle à son dogme, l’Église condamne la richesse, dont Dieu seul est digne, et se contente de la montrer à l’homme, dans les exhibitions du culte, comme une perspective de la céleste béatitude. Elle affirme, comme nécessaire et providentielle tout à la fois, l’inégalité des conditions ; elle fait du paupérisme un jugement de Dieu ; elle organise, comme palliatif, la charité, et pousse de toutes ses forces, par l’agglomération des biens aux mains du clergé, la masse travailleuse, partie au communisme conventuel, partie au servage ou salariat féodal.

Et c’est logique : après avoir créé le bon homme, l’Église glorifie le bon pauvre. Un peuple de Lazares, de Lazarilles, de Lazaroni, quel idéal !

Forcée néanmoins de ménager et d’entretenir une classe intermédiaire, noblesse ou bourgeoisie, entre le clergé, tant régulier que séculier, et le peuple, l’Église ne fait aucune difficulté de retenir pour cette classe le droit païen de propriété, droit, selon elle, né de la force et du hasard, droit sans principe, que le parti prêtre affecte depuis 1848 de défendre, avec le même acharnement qu’il défendait en 1789 les biens revendiqués par la Révolution.

Est-ce là une justice ?

Est-ce une justice que cette classification artificielle, créée pour le besoin du système, d’une nation en proprié-