Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/254

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tions que lui ferait le nouveau mode d’apprentissage, assurant à l’ouvrier une supériorité réelle sur l’homme de science pure.

La science, en effet, est essentiellement spéculative, et ne requiert l’exercice d’aucune autre faculté que de l’entendement. L’industrie, au contraire, est à la fois spéculative et plastique : elle suppose dans la main une habileté d’exécution adéquate à l’idée conçue par le cerveau. On peut dire que sous ce rapport l’intelligence de l’ouvrier n’est pas seulement dans sa tête, elle est aussi dans sa main. C’est ce double esprit de prophétie et de miracle dont Élizée demandait à son maître Élie la survivance. Le savant qui n’est que savant est une intelligence isolée, ou pour mieux dire mutilée, faculté puissante de généralisation et de déduction, si l’on veut, mais sans valeur organique ; tandis que l’ouvrier dûment instruit représente l’intelligence au complet, intuitive et plastique, l’intelligence servie par des organes, disait M. de Bonald.

L’industriel, si longtemps dédaigné, devenu supérieur au savant classique, quel paradoxe !

XLV

Ce n’est pas tout.

Le propre des institutions fausses est de rendre les idées obscures et de poser des problèmes insolubles ; puis, quand le voile qui couvrait toutes ces sottises se déchire, de soulever contre la vérité immaculée la calomnie des traditions.

Qu’est-ce que le droit au travail ? Existe-t-il un droit au travail ? se demandaient, de la meilleure foi et avec la meilleure volonté du monde, les Constituants de 1848. Dans un État despotique où toute richesse et toute industrie relèvent du prince, on conçoit une sorte de pacte entre