Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/33

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une vertu surnaturelle, qui la rend nécessaire à l’accomplissement du mystère. Il est si vrai, par exemple, que l’eau est indispensable à la régénération chrétienne, que, si vous supprimez de la profession de foi du néophyte l’infusion liquide, malgré toutes les invocations il n’y a pas de baptême, et le péché subsiste. Au contraire, qu’un incrédule, un juif, un mahométan, ondoie le nouveau-né, en prononçant sur lui la formule : Je te baptise, au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, l’enfant est chrétien, il est entré en grâce ; que la mort le frappe, il verra Dieu.

Ainsi la pensée religieuse, après avoir conçu le monde transcendantal, fait produire à ce monde, par l’intermédiaire des créatures visibles, des effets surnaturels. De là les miracles opérés par le nom de Jéhovah, par le manteau d’Élie, le bâton d’Élisée, les clous de la vraie Croix, les ossements des saints ; de là la vertu attribuée au saint chrême, aux saintes huiles, aux images, médailles, scapulaires, etc., dans lesquels toute l’Église considère, suivant le plaisir de Dieu, des intermédiaires, instruments ou véhicules de l’action du ciel. De là, enfin, chez les ministres du culte, et généralement chez tous les croyants, une certaine disposition à se contenter, de la part des indifférents, des démonstrations extérieures : ils espèrent toujours que par l’efficace qu’il a plu à Dieu d’attacher aux symboles de son culte, l’acte matériel, réagissant sur la volonté, déterminera la foi. Une seule comparution à la messe, un semblant de confession, un rien, suffit à leur piété. On les accuse d’hypocrisie ; on se trompe. Ce que le mondain traite ici de grimace, et qui de sa part serait une indignité, prouve précisément la sincérité du fidèle.

XI

En 1848, quand les pétitions pleuvaient à l’assemblée nationale des quatre coins de la France, demandant que