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tion de notre spontanéité, produite par la suspension des causes qui agissent sur elle, ni au sentiment intérieur que Descartes prétend que nous avons de notre liberté, et qu’il présente comme la preuve irrécusable qu’elle existe, puisque ce sentiment, n’étant autre que celui de la conformité de nos actions avec les lois de notre conscience et de notre entendement, qui sont celles de Dieu et de la nature, peut servir aussi bien à prouver que nous ne sommes point libres.

En résultat, l’homme est une spontanéité gouvernée par une législation qui l’enveloppe ; il est dit libre lorsque rien ne l’empêche d’obéir à ses lois : voilà tout ce qui ressort de l’argumentation de Descartes. Quant à la liberté véritable, au franc arbitre, c’est une faculté idéale dont la réalisation se trouve en Dieu, mais qui dans l’homme est sans emploi, et n’apparaît que comme une puissance de négation vis-à-vis de telle ou telle cause particulière dont il tend à s’affranchir, sans qu’il puisse s’affranchir jamais de l’ensemble des causes, qui le détermine et le presse.

Ce que Descartes appelle liberté d’indifférence, par un reste d’égard pour le préjugé, n’est qu’un état de raison, une sorte de point mathématique, servant à marquer l’instant indivisible où cette spontanéité, ne recevant d’aucun côté une impulsion prépondérante, resterait, par hypothèse, au repos. L’homme libre, suivant Descartes, c’est l’homme qui est entre la vie et le néant.

XXI

Spinoza.

Spinoza nie le franc arbitre avec autant d’énergie que Descartes en avait mis à l’affirmer. Pour cela il lui suffit de rétablir l’ordre dans la pensée de Descartes, et d’en tirer les conséquences.