Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/490

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excité, jamais nécessité. À ce propos, Leibnitz cite l’aphorisme des astrologues : Astra inclinant, non necessitant. Et il se moque agréablement des cartésiens et de Bayle, qui admettaient l’hypothèse de l’âne de Buridan, immobile entre deux prés :

« L’univers ne saurait être mi-parti par un plan tiré par le milieu de l’âne, coupé verticalement suivant sa longueur, en sorte que tout soit égal et semblable de part et d’autre. Car ni les parties de l’univers ni les viscères de l’animal ne sont semblables ni également situés des deux côtés de ce plan vertical. »

Il pouvait ajouter que, le fussent-ils à un instant donné, par le mouvement universel ils cesseraient aussitôt de l’être.

Tout est ainsi lié dans l’univers, non par une action absolue et nécessitante, mais par une réciproque influence : ce qui détruit à la fois la liberté pure et la nécessité pure, deux conceptions idéales, qui ne servent qu’à marquer les deux points extrêmes de la réalité.

De plus, comme toutes les parties de l’univers sont coordonnées entre elles, suivant la qualité spécifique des monades, et l’ensemble subordonné à Dieu, l’être souverain, il s’ensuit que l’univers, malgré l’imperfection relative de toutes ses parties, et malgré sa propre imperfection comparativement à Dieu, est cependant, au total, le meilleur possible.

Leibnitz n’était pas homme, comme Spinoza, à rompre en visière aux croyances établies pour un système de métaphysique ; il tenait à vivre bien avec les puissances, surtout avec l’Église. Aussi sa grande affaire fut-elle moins de démontrer sa synthèse dans sa rigueur dialectique, que de la concilier avec la foi. Toutes les objections lui vinrent de ce côté. Il n’y eut pas jusqu’à Bayle qui, au lieu de prendre le système des monades, comme il convenait,