Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/494

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soi. Cest pourquoi tout être qui ne peut agir autrement que sous l’idée de liberté est censé, à cause de cela, pratiquement libre. » (Willm, Histoire de la philosophie allemande, t. Ier, p. 368, 370, 373, 375.)


Si Kant ne nous dit rien de net, au moins il ne se compromet pas. Il se garde bien d’affirmer quoi que ce soit ; il ne connaît que des apparences. — Si la volonté était une cause, la liberté serait l’indépendance de cette cause. Or, la volonté est-elle une cause ? Aucune expérience ne le prouve. Au cas que la volonté soit cause, cette cause est-elle indépendante ? Rien ne le prouve davantage. La liberté étant admise comme cause, quels sont ses effets ? en autres termes, quelle est la fonction de la liberté et à quoi sert-elle ? Kant ne s’est pas même posé la question. Qu’est-ce donc que la liberté ? Une idée dont la morale a besoin pour s’établir elle-même !… Ceci est un sacrifice que Kant fait au préjugé universel, qui affirme, comme corrélatives, se supposant et se motivant réciproquement, la Justice et la liberté. Mais un philosophe ne sacrifie pas au préjugé, il le tue ou il le prouve. Kant, en un mot, ne sait rien : je serais plus content de lui s’il l’eût avoué de meilleure grâce.

Fichte ne reconnaît de liberté que dans le moi absolu, lequel moi n’est ni le vôtre ni le mien, mais seulement une idée, un idéal. Cela ne revient-il pas au Dieu de Descartes, qui pourrait faire un cercle carré, si tel était son bon plaisir, avec cette différence cependant, que Descartes prend son Dieu pour une réalité, tandis que Fichte ne fait du sien qu’une idée, un idéal ?

« La morale a pour principe la liberté : sa loi est la détermination absolue de soi par soi-même, et sa fin est l’indépendance absolue du sujet raisonnable de tout ce qui n’est pas lui.

« Mais cette liberté, qui est celle du moi idéal, cette aspiration à la liberté, ne doit pas être confondue avec ce farouche