Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/89

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« Amassez-vous, dit-il ailleurs, des trésors dans le ciel, et non pas sur la terre ; ceux-là ne craignent ni la rouille ni les voleurs. »

Cette théorie du détachement revient sans cesse. La haine des riches, qui attirait à la secte tant de misérables, y est bien pour quelque chose, ainsi que le témoigne Jacques, en son épître catholique, chap. v. Mais le fonds de la doctrine est la haine même de la richesse, la haine du bien-être, la haine de la possession territoriale, haine basée sur la séparation théologique de Dieu et de la nature, de l’âme et du corps.

« Ce que c’est que la mort ! s’écrie le Pensez-y bien. C’est une séparation générale de toutes les choses de ce monde. Quand vous serez venu à ce moment fatal, il n’y aura plus pour vous ni plaisirs, ni charges, ni parents, ni richesses, ni grandeurs, ni amis. (Il n’y aura plus que le prêtre !) Eussiez-vous à votre disposition tous les biens du monde, tout cela ne vous accompagnera que jusqu’au tombeau. Un suaire et un cercueil est tout ce que vous emporterez de cette vie. Pensez-y bien ! »


Les missionnaires ne cessent de retourner ce tableau funèbre, dont la conclusion est prévue :

« Si la mort doit nous priver pour toujours des biens passagers de ce monde, dont nous ne saurions jouir que quelques années, pourquoi donc les rechercher avec tant d’empressement ? Pourquoi les posséder avec tant d’attache ? Ne vaudrait-il pas mieux en faire dès à présent ton sacrifice à Dieu ? »


C’est-à-dire à l’Église, n’est-il pas vrai, Monseigneur ? Car ce qui est mauvais pour l’homme est bon pour l’Église : le premier passe comme l’ombre ; la seconde ne jouit ni ne meurt, c’est pour cela qu’elle a reçu de Dieu la puissance et la propriété sur tout le globe.

Il faut voir de quelles histoires le Pensez-y bien assaisonne sa morale !

« Le grand Saladin, avant de mourir, appela celui qui por-