Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/118

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nous a permis ensuite de déterminer le rôle que joue l’absolu dans les Idées, détermination qui nous a immédiatement livré, avec les éléments de la métaphysique, les garanties de la Raison et de la Foi publiques.

Maîtres de ces données, nous avons pu aborder enfin la théorie du Libre arbitre, qui seule pouvait à son tour nous mettre sur le chemin du Progrès.

Maintenant la théorie du Progrès va se changer pour nous en une théorie de l’art, autant du moins qu’il est permis d’appliquer ce mot, tout mathématique, de théorie, à des choses qui, comme l’art, la liberté, l’absolu, sont par nature indéfinissables.

Ainsi, par la déduction de son idée fondamentale, qui est le droit, la Révolution se lève complétement armée en face de l’ancien monde : aux révélations et aux mythes elle oppose, sur toutes les parties du domaine philosophique, sa certitude ; elle possède ce dont les âges de foi et d’autorité n’eurent jamais que l’ombre, une métaphysique, une éthique, une économie, une politique, une pédagogie, une psychologie, une esthétique ; elle se connaît elle-même, elle a, selon l’heureuse expression de M. Oudot, science et conscience.

Maintenant, une esthétique, une théorie de l’art, est-elle possible ?

Si une pareille théorie est possible, en quoi l’art diffère-t-il de la science proprement dite, ou de l’industrie ? Dans le cas contraire, c’est-à-dire si l’art ne se peut réduire en préceptes et formules, quelle peut être la légitimité d’une notion, la réalité d’une chose, qui se refuse à la définition ?

On voit que le problème de l’esthétique est le même que celui du libre arbitre : Si le libre arbitre se définit, c’est de la fatalité ; s’il ne se définit pas, c’est néant.