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Par l’idéal, l’homme conserve sa dignité en amour : il triomphe du fatalisme des sens et de la bestialité de la chair alors même qu’il en accomplit le vœu ; il peut, sans déroger, vaquer à la génération et accepter le mariage.

Par l’idéal aussi se découvre une première raison de la distinction des sexes. La faculté que l’homme possède d’idéaliser les objets ne s’exerce pas sur lui-même ; il ne peut pas devenir pour soi une idole. Puisque l’influence de l’idéal était nécessaire aux générations de l’humanité, il fallait une division sexuelle ; en deux mots, à l’homme, viro, il fallait la femme.

5. Ici nous tombons dans une autre difficulté.

En triomphant des répugnances de l’esprit par la beauté, nous sommes exposés aux séductions de l’idéalisme, plus terribles cent fois que celles de la chair. La conservation de l’espèce et la félicité des sexes se trouveraient de nouveau et plus tristement compromises, s’il n’intervenait un troisième élément, dont cette étude et la suivante auront surtout pour objet de déterminer le rôle : cet élément est la Justice.

Déjà nous avons vu, par la théorie du progrès et de l’origine du péché, comment l’idéal tend à se corrompre, entraînant dans sa ruine la liberté et la société, s’il n’est incessamment soutenu, relevé, purifié, assaini, par le condiment du Droit.

Il faut à l’amour, même idéalisé, comme à la propriété et au pouvoir, comme aux idées et à la philosophie, une loi d’équilibre, sans laquelle il dégénère fatalement en débauche, et, au lieu de perpétuer la vie sociale, conduit la civilisation à sa perte.

Quelle sera cette nouvelle application de la Justice, qui rachète l’homme et la femme de la luxure ?

Mais ceci n’est qu’une partie de la question. Puisque, d’après tout ce qui précède, la génération, la distinction