Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/337

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séminaires, tombe juste dans la catégorie des délits sans nom prévus par les articles 334 et 335 du Code pénal.

Au reste, tous ne poussent pas le sacrifice à ces extrémités. Dans un siècle de scepticisme libertin, où le public ne tient compte d’aucune conviction, d’aucun effort, on a bientôt pris son parti ; on se dit qu’on a été trompé ; on ne veut pas davantage être dupe, et, pourvu que les bienséances soient sauves, on se regarde comme suffisamment en règle avec le public et avec sa conscience. — Évitez le scandale, disait un vieux magistrat à ses jeunes confrères, le reste n’est rien. — Cela ne se dit pas sans doute entre ecclésiastiques ; mais cela se pense, et, si bien prises que soient les précautions, tout le monde sait que cela se pratique. « Mon vœu de pauvreté, racontait un prélat du dernier siècle, m’a valu 200,000 livres de rente ; mon vœu d’obéissance m’a fait prince de l’Église. — Et votre vœu de chasteté, Monseigneur ?… » Il baissait les yeux et se taisait, par respect pour les mœurs.

XLIX

Puisque je suis en cause, qu’il s’agit ici beaucoup moins de religion que de psychologie, et qu’après tout, en attaquant l’amour mystique, je plaide en faveur de malheureux prêtres les circonstances atténuantes, qu’on me permette de rapporter une observation faite sur moi-même, et dans laquelle plus d’un lecteur se reconnaîtra.

Comme il arrive à beaucoup d’autres, ma jeunesse débuta par un amour platonique qui me rendit bien sot et bien triste, mais auquel je dus, par compensation, de rester pendant dix ans après ma puberté à l’état d’agnus castus. Ce qui détermina en moi cette affection mentale, sur laquelle les parents devraient veiller avec autant de soin que sur les plus honteuses habitudes, fut la lecture de Paul et Virginie, pastorale prétendue inno-