Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/35

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organique, on s’est approché davantage, je le veux bien, de la vérité objective et physionomique de l’histoire ; on n’a rien fait pour le progrès.

L’histoire est-elle donnée tout entière dans la constitution de l’espèce, dans la configuration du globe et la mécanique de l’esprit : dans ce cas point de progrès ; l’histoire est une pure physiologie. Au contraire, la liberté a-t-elle aussi sa place dans l’histoire : alors le progrès, du fait de la liberté, est possible ; on demande seulement quel il est. Mais jusqu’à présent la question est restée sans réponse ; il ne manque même pas d’historiens, et ce sont justement les partisans du progrès, pour dire que la liberté n’apparaît dans l’histoire que pour en troubler l’ordre, ce qui veut dire en arrêter le progrès !  !  !

Le livre de Herder, Idées sur la philosophie de l’histoire, jouit d’une réputation méritée, et je n’y trouve qu’un défaut, c’est que les idées n’y sont absolument pour rien. Tout le système repose sur le fatalisme géographique, chimique et organique, sol, climat, plaines et montagnes, rivières, lacs et mers, d’où se déduisent successivement, pour chaque latitude et méridien, la flore et la faune, puis l’homme, finalement la société et son histoire. Rien à y reprendre ; seulement, on se demande ce que la liberté et le progrès ont à faire là-dedans, on ne voit pas même de quoi y sert l’intelligence.

XI

Voici Hégel : sans doute il va nous donner du nouveau, car il prend tout le contre-pied de Herder. Suivant lui, les idées forment le système nerveux, non-seulement de la phénoménalité sociale, mais de la nature même ; il y a seulement cette différence entre l’évolution de la nature et le développement humain, que là il ne surgit rien de nouveau, tandis qu’ici tout est soumis à la loi de perfec-