Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/376

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morale de l’homme, comme nous savons qu’elle en tire sa valeur intellectuelle.

Et c’est à quoi j’ose répondre : Non, la femme, considérée sous le rapport de la Justice, et dans l’hypothèse de ce qu’on appelle son émancipation, ne serait pas l’égale de l’homme. Sa conscience est plus débile, de toute la différence qui sépare son esprit du nôtre ; sa moralité est d’une autre nature ; ce qu’elle conçoit comme bien et mal n’est pas identiquement le même que ce que l’homme conçoit lui-même comme bien et mal, en sorte que, relativement à nous, la femme peut être qualifiée un être immoral.

La raison des choses l’indique à priori, et l’observation le confirme.

Qui produit, chez l’homme, cette énergie de volonté, cette confiance en lui-même, cette franchise, cette audace, toutes ces qualités puissantes que l’on est convenu de désigner par un seul mot, le moral ? Qui lui inspire, avec le sentiment de sa dignité, le dégoût du mensonge, la haine de l’injustice, et l’horreur de toute domination ? Rien autre que la conscience de sa force et de sa raison. C’est par la conscience qu’il a de sa propre valeur que l’homme arrive au respect de lui-même et des autres, et qu’il conçoit cette notion du droit, souveraine et prépondérante eu toute âme virile. Toutes les langues consacrent cette analogie : la force est le point de départ de la vertu.

Les choses ne se passent pas de même chez la femme. Son moi, dit très-bien Mme  Necker de Saussure, se sent plus faible : de là sa timidité naturelle, son instinct de résignation et de soumission, sa docilité, sa facilité à pleurer, son manque d’orgueil qui la porte à s’humilier, à implorer, à demander grâce, sans qu’elle en éprouve honte ni déchéance.