Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/425

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réserver les droits de Dieu, des droits que l’on prétend antérieurs et supérieurs à ceux de l’époux, c’est séparer ce que Dieu même a joint, et changer le mariage en concubinage.

Après une tirade contre les abus du pouvoir marital, Mme  Necker fait appel à l’égalité mystique en Christ. Elle est loin de se douter, la dévote institutrice, du chemin qu’on pourrait lui faire parcourir, avec cette égalité. Nous n’en avons déjà que trop dit ; n’en parlons plus. Constatons seulement la fatalité de la loi qui mène toutes ces émancipées : bon gré mal gré elles tombent toutes dans l’érotisme, érotisme sensuel, si avec le respect conjugal elles ont perdu la foi religieuse ; érotisme mystique, si elles sont demeurées fidèles. Les Thérèse, les Chantal, les Guyon, les Cornuau, les Krudener, émancipées de l’Église, sont sœurs de Ninon de Lenclos, de Mme  du Châtelet, d’Épinay, de Tencin, du Deffant, de Genlis, de Geoffrin, émancipées de la philosophie. Toutes se valent, toutes sont également à craindre pour la famille et la société.

Mme  Necker de Saussure est si peu amie du sexe masculin, qu’elle voudrait pouvoir ôter aux jeunes filles leurs grâces naturelles et leurs attraits. Elle ne supporte pas ce culte universel rendu à la beauté.

« Le culte de la beauté a des autels indestructibles dans le cœur des femmes. Bien plus, des hommes graves, des penseurs capables de le juger tel qu’il est, des moralistes qui devraient en diminuer l’influence, l’augmentent encore. Ils semblent fascinés à la simple idée de beauté. Et ceux qu’on croirait appelés à donner aux femmes des conseils sévères s’arrêtent retenus par la crainte de nuire à leurs charmes. »

« Et pourtant il faut être sévère…… »

Ne voilà-t-il pas un grand malheur que les femmes soient belles, qu’elles ajoutent, par la parure, à leur beauté, que même elles mêlent à tout cela un peu de coquetterie ? Eh bien ! madame, puisqu’il faut vous le dire, sachez-le donc : la beauté, c’est toute la femme. Ôtez-lui la beauté, elle n’est plus rien pour l’homme ; elle n’est rien même devant Dieu ; et votre Éducation soi-disant progressive, qui conduit la jeune fille au mépris de l’homme et de la beauté, est une éducation à recu-