Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/471

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cœur des enfants sous le nom à jamais consacré de piété filiale. Père de famille, tu dois être un jour le premier et le meilleur ami de ton fils ; ne te hâte pas trop cependant, si tu ne veux courir le risque de son ingratitude. La plus sûre garantie que tu puisses te donner de l’amitié de ce fils, lorsqu’il sera devenu homme, c’est la prolongation de son respect.

Ainsi le mariage, par le rapport mystérieux de la force et de la beauté, forme une première juridiction ; la famille, par la communauté de conscience qui régit ses membres, par la similitude d’esprit et de caractère, par l’identité du sang, par l’unité d’action et d’intérêt, en forme une seconde : c’est un embryon de république, où l’égalité commence à poindre sous l’autorité hiérarchique, mais viagère, de la mère et du père. Dans ce petit état, les droits et devoirs pour chacun se déduiront de la théorie du pacte conjugal : pas n’est besoin d’en rapporter les formules.

Le dernier mot de cette constitution, moitié physiologique, moitié morale, est l’hérédité : n’est-ce pas une honte pour notre dix-neuvième siècle qu’il faille encore la défendre ? L’humanité, qui se renouvelle continuellement dans ses individus, est immuable dans sa collectivité, dont chaque famille est une image. Qu’importe alors que le gérant responsable change, si le vrai propriétaire et usufruitier, si la famille est perpétuelle ? Bien loin de restreindre la successibilité, je voudrais, en faveur des amis, des associés, des compagnons, des confrères et des collègues, des domestiques eux-mêmes, l’étendre encore. Il est bon que l’homme sache que sa pensée et son souvenir ne mourront pas : aussi bien n’est-ce pas l’hérédité qui rend les fortunes inégales, elle ne fait que les transmettre. Faites la balance des produits et des services, vous n’aurez rien contre l’hérédité.