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libre est à l’attraction et à la matière, l’équation à l’esprit, l’amour à l’âme, l’idéal à la liberté, la Justice l’est à la société humaine. Et comme toute loi se fait un organe de chaque existence qu’elle est appelée à régir, nous avons vu la Justice, après s’être réalisée à l’appel de l’amour dans le couple conjugal, se réaliser avec plus d’ampleur dans le groupe familial.

Un pas de plus, et notre théorie du mariage, ou de l’organisme juridique, est complète.

XXXIX

Au point où nous sommes parvenus, un phénomène curieux va se passer : c’est la dégradation de l’idéal, qui, rendant les sexes l’un à l’autre indifférents, menace d’abolir la Justice.

L’initiation familiale est une demi-initiation, que soutiennent fort bien pendant un temps l’autorité paternelle, la confiance des enfants, la religion domestique ; mais qui de frère à sœur n’a plus la même activité, et, réduite peu à peu à une simple habitude, à un souvenir, à une sympathie, est en danger de se perdre.

Il faut que l’amour vienne de nouveau chez les jeunes sujets reconforter la conscience : or, cet amour ne peut plus exister entre eux, il s’est épuisé dans l’union qui leur a donné l’être. Du frère à la sœur, comme du père à la fille et du fils à la mère, la consanguinité et la famille ont créé une incompatibilité d’amour que toutes les législations ont consacrée, et dont la raison est facile à saisir.

Du côté des parents, il y a d’abord l’amour paternel et maternel, positivement distinct de l’amour conjugal, et qui, loin de faiblir, augmentant avec les années, exclut radicalement la succession des deux sortes d’amour dans le même individu. Du côté des enfants, la répugnance