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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

nom du Christ, » retarder de plus de deux siècles une révolution nécessaire.

J’ai associé le nom de Rembrandt à celui de Luther ; il faut placer à côté d’eux W. Shakespeare. Shakespeare, c’est l’art dramatique, c’est la littérature qui se fait contemporaine, populaire, de grecque et latine, homérique, biblique et académique qu’elle était restée, et que, plus que jamais, nous autres Français, nous allions la faire. Telle était notre destinée malheureuse : en repoussant la Réforme, nous rompions avec notre littérature nationale ; nous n’avions plus qu’à ronger les Grecs, les Latins, les Hébreux, trop heureux que cette lecture, qui faillit, à force de pédantisme, nous rendre fous, ait pu servir enfin, grâce aux efforts des Boileau, des Racine, des Molière, des Voltaire, etc., à l’expurgation de nos âmes.

Shakespeare a surpassé les Hollandais de toute la supériorité de la poésie et du drame sur la peinture. Lui aussi a su mettre en scène, à côté des princes coupables, malheureux et pauvres, les classes inférieures de la société. C’est là qu’il va chercher ses mots les plus profonds ; c’est par ces bouches ignobles qu’il fait passer la pensée et la moralité de ses drames. Panurge chez nous, Gil Blas et l’immortel Martin de Candide sont de cette famille. Nous pouvons juger, par les ouvrages d’un Rabelais, d’un Montaigne, d’un La Fontaine, d’un Le Sage, par ce que nous ont donné de