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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

ture, et c’est en même temps beau et moral : tout ce que vous pouvez souhaiter en matière d’art... — N’allons pas si vite, ami lecteur. Un tableau sans reproche, comme un sonnet sans défaut, est chose rare et difficile. Celui de Léopold Robert m’a longtemps fait grand plaisir, et je ne veux rien retirer des éloges qu’il a mérités. A force d’y penser, — on n’attache sa pensée qu’aux choses que l’on aime et que l’on admire,- j’ai fini par trouver à l’œuvre du peintre neufchâtelois plus d’une chose à reprendre.

Faisons-nous d’abord une règle. Un portrait,je prends la chose d’un peu haut, doit avoir, s’il est possible, l’exactitude d’une photographie ; il doit, de plus que la photographie, exprimer la vie, la pensée intime, habituelle du sujet. Tandis que la lumière, non pensante, instantanée dans son action, ne peut donner qu’une image brusquement arrêtée du modèle, l’artiste, plus habile que la lumière, parce qu’il réfléchit et qu’il sent, fera passer dans sa figure un sentiment prolongé ; il en exprimera l’habitude, la vie. L’image photographiée est une cristallisation faite entre deux battements du pouls ; le portrait fait par l’artiste, en une suite de séances et sur une longue observation, vous livre des semaines, des mois, des années d’une même existence. Aussi l’homme est-il beaucoup mieux connu par la peinture que par la photographie. Mais quelque latitude qui soit laissée au peintre, il lui est interdit de