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DU PRINCIPE DE L’ART

gendre une seconde, de laquelle l’art tirera tout son développement. Doué de cette faculté esthétique. l’homme se l’applique à lui-même : il veut être beau, se faire beau, noble, glorieux, sublime, et le devenir de plus en plus. Lui dénier ce mérite, combattre cette prétention, c’est l'outrager. Si l'art a son principe dans la faculté esthétique, sens poétique, ou comme on voudra l’appeler, il reçoit l’impulsion de l’estime de soi ou de l’amour-propre. La première de ces deux facultés donne le germe ; la seconde est la force motrice, qui produit l’accroissement. Enfin, de l’action combinée de ces deux causes, la faculté esthétique et l’amour-propre, naît une troisième faculté, appelée à jouer dans l’an un grand rôle, mais qui cependant ne lui est pas absolument indispensable, et dans tous les cas demeure secondaire, la faculté limitation. Reproduire, en effet, par la peinture, la statuaire, ou de toute autre manière, un objet qui plaît, c’est en jouir de nouveau, c’est suppléer à son absence et à sa perte, c’est bien souvent l’embellir encore. La poésie, le chant, la musique, la danse, les pompes ou processions, vont au même but.

Retenons donc ceci, à rencontre de ce qu’ont prétendu quelques auteurs, qui ont vu dans la faculté d’imitation le principe de l’art, qu’elle n’est pas du tout, si éminente qu’on la suppose, non plus que l’estime de soi, ce qui constitue l’artiste. De même qu’on peut être un habile versificateur sans être poëte, de même il peut