Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/148

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Ce fut Saint-Simon qui le premier, dans un langage timide, et avec une conscience obscure encore, ressaisit la filière.

…...« L’espèce humaine, écrivait-il dès l’année 1818, a été appelée à vivre d’abord sous le régime gouvernemental et féodal ;
…...» Elle a été destinée à passer du régime gouvernemental ou militaire sous le régime administratif ou industriel, après avoir fait suffisamment de progrès dans les sciences positives et dans l’industrie ;
…...» Enfin, elle a été soumise par son organisation à essuyer une crise longue et violente, lors de son passage du système militaire au système pacifique.
…...» L’époque actuelle est une époque de transition :
…...» La crise de transition a été commencée par la prédication de Luther : depuis cette époque la direction des esprits a été essentiellement critique et révolutionnaire. »

Saint-Simon cite ensuite à l’appui de ses idées, et comme ayant eu l’intuition plus ou moins vague de cette grande métamorphose, parmi les hommes d’État, Sully, Colbert, Turgot, Necker, Villèle même ; parmi les philosophes, Bacon, Montesquieu, Condorcet, A. Comte, B. Constant, Cousin, A. de Laborde, Fiévée, Dunoyer, etc.

Tout Saint-Simon est dans ces quelques lignes, écrites du style des prophètes, mais d’une digestion trop rude pour l’époque où elles furent écrites, d’un sens trop condensé pour les jeunes esprits qui s’attachèrent les premiers au noble novateur. On ne trouve là-dedans, remarquez-le bien, ni communauté des biens et des femmes, ni réhabilitation de la chair, ni androgyne, ni Père Suprême, ni Circulus, ni Triade. Rien de ce qui a été mis en vogue par les disciples