Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/183

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10, 15, et au delà pour 100 : alors le mode d’exécution sera trois ou quatre fois plus onéreux au peuple que l’impôt ou l’emprunt. Qu’importe, encore une fois, pour le Peuple, de payer aux banquiers un intérêt usuraire ; ou aux agents de l’autorité, placés aux premières loges, des différences ?

L’Etat opérera-t-il le transport gratuit, ou tirera-t-il un revenu du chemin de fer ?

Si le peuple demande le transport gratuit, il se fait volontairement illusion, puisque tout service doit être payé ; si le peuple décide que l’État tirera un revenu, il manque à son propre intérêt, puisque les services publics doivent être sans bénéfices. La question est donc mal posée. Il fallait dire : Le prix du transport sera-t-il, ou non, égal au prix de revient ? Mais comme le prix de revient varie sans cesse, et qu’il faut, pour en faire l’application d’une manière suivie, une science et une législation particulière, il s’ensuit en définitive que sur ce point, comme sur tous les autres, la réponse du peuple, sera non pas une loi, mais une surprise.

Est-il clair que cette législation directe n’est autre chose qu’un perpétuel escamotage ? Sur cent questions posées au Peuple par le Gouvernement, il y en aura quatre-vingt-dix-neuf dans le cas des précédentes ; et la raison, M. Rittinghausen qui est logicien ne peut l’ignorer, c’est que les questions posées au peuple seront ordinairement des questions spéciales, et que le suffrage universel ne peut donner que des réponses générales. Le législateur mécanique, forcé d’obéir au dilemme, ne pourra modifier sa formule suivant la vérité du lieu, du moment, de la circonstance : sa réponse, calculée sur la fantaisie populaire, sera connue d’avance, et, quelle que soit cette réponse, elle sera toujours fausse.