Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/260

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leurs, un vaste déploiement de machines et de bras, et, pour me servir des expressions techniques, une grande division du travail, par conséquent une haute concentration de forces. Là, l’ouvrier est nécessairement subordonné à l’ouvrier, l’homme dépend de l’homme. Le producteur n’est plus, comme au champ, un père de famille souverain et libre ; c’est une collectivité. Les chemins de fer, les mines, les manufactures, sont dans ce cas.

Ici donc, de deux choses l’une : ou le travailleur, nécessairement parcellaire, sera simplement le salarié du propriétaire-capitaliste-entrepreneur ; ou bien il participera aux chances de perte et de gain de l’établissement, il aura voix délibérative au conseil, en un mot il deviendra associé.

Dans le premier cas le travailleur est subalternisé, exploité ; sa condition perpétuelle est l’obéissance et la misère. Dans le second seulement il reprend sa dignité d’homme et de citoyen ; il peut aspirer à l’aisance ; il fait partie du producteur, dont il n’était auparavant que l’esclave, comme dans la cité il fait partie du souverain, dont auparavant il n’était que le sujet.

Ainsi nous n’avons point à hésiter, car nous n’avons pas le choix. Là où la production nécessite une grande division du travail, une force collective considérable, il y a nécessité de former entre les agents de cette industrie une Association, puisque sans cela ils resteraient les uns par rapport aux autres subalternes, et qu’il y aurait ainsi, du fait de l’industrie, deux castes, celle des maîtres et celle des salariés : chose qui répugne dans une société démocratique et libre.

Telle est donc la règle que nous devons nous poser,