Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/330

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est impossible dans le régime industriel, par la raison décisive que l’instruction est inséparable de l’apprentissage, l’éducation scientifique de l’éducation professionnelle. En sorte que l’instituteur, le professeur, quand il n’est pas lui-même contre-maître, est avant tout l’homme de la corporation, du groupe industriel ou agricole, qui l’utilise. Comme l’enfant est le lien, pignus, entre les parents, l’école devient le lien entre les corporations industrielles et les familles : il répugne qu’elle soit séparée de l’atelier, et sous prétexte de perfectionnement, qu’elle tombe sous une puissance extérieure.

Séparer, comme on le fait aujourd’hui, l’enseignement de l’apprentissage, et ce qui est plus détestable encore, distinguer l’éducation professionnelle de l’exercice réel, utile, sérieux, quotidien, de la profession, c’est reproduire, sous une autre forme, la séparation des pouvoirs et la distinction des classes, les deux instruments les plus énergiques de la tyrannie gouvernementale et de la subalternisation des travailleurs.

Que les prolétaires y songent !

Si l’école des mines est autre chose que le travail des mines, accompagné des études propres à l’industrie minérale, l’école n’aura pas pour objet de faire des mineurs, mais des chefs de mineurs, des aristocrates.

Si l’école des arts et métiers est autre chose que l’art et le métier, elle n’aura bientôt plus pour objet de faire des artisans, mais des directeurs d’artisans, des aristocrates.

Si l’école du commerce est autre chose que le magasin, le bureau, le comptoir, elle ne servira pas à faire des commerçants, mais des barons du commerce, des aristocrates.