Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/351

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rapports sont intervertis. Hier, nous marchions la tête en bas ; aujourd’hui nous la portons haute, et cela sans qu’il y ait eu d’interruption dans notre vie. Sans que nous perdions notre personnalité, nous changeons d’existence. Telle est au dix-neuvième siècle la Révolution.

L’idée capitale, décisive, de cette Révolution, n’est-elle pas, en effet : Plus d’Autorité, ni dans l’Église, ni dans l’État, ni dans la terre, ni dans l’argent ?

Or, plus d’autorité, cela veut dire ce qu’on n’a jamais vu, ce qu’on n’a jamais compris, accord de l’intérêt de chacun avec l’intérêt de tous, identité de la souveraineté collective et de la souveraineté individuelle.

Plus d’autorité ! c’est-à-dire, dettes payées, servitudes abolies, hypothèques levées, fermages remboursés, dépenses du culte, de la justice et de l’État supprimées ; crédit gratuit, échange égal, association libre, valeur réglée ; éducation, travail, propriété, domicile, bon marché, garantis ; plus d’antagonisme, plus de guerre, plus de centralisation, plus de Gouvernements, plus de sacerdoces. N’est-ce pas la Société sortie de sa sphère, marchant dans une position renversée, sens dessus dessous ?

Plus d’autorité ! c’est-à-dire encore, le Contrat libre, à la place de la loi absolutiste ; la transaction volontaire, au lieu de l’arbitrage de l’État ; la justice équitable et réciproque, au lieu de la justice souveraine et distributive ; la morale rationnelle, au lieu de la morale révélée ; l’équilibre des forces, substitué à l’équilibre des pouvoirs ; l’unité économique à la place de la centralisation politique. Encore une fois, n’est-ce point là ce que j’oserai appeler une conversion complète, un tour sur soi-même, une Révolution ?