Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/73

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des hommes un phénomène aussi constant, aussi régulier que l’accroissement du budget, alors surtout que cet accroissement a son corrélatif dans le progrès des hypothèques et des inscriptions au grand-livre, est aussi absurde que d’expliquer la peste d’Orient ou la fièvre jaune par l’ignorance des médecins. C’est l’hygiène qu’il faut attaquer ; c’est votre régime économique qui appelle une réforme.

Ainsi le Gouvernement, considéré comme organe de l’ordre et garantie des libertés, suit la même marche que la société ; il tombe de plus en plus dans la gêne, il s’endette et tend à la banqueroute. Nous allons voir encore, que comme la société, livrée à l’anarchie de ses éléments, tend à reconstituer les castes antiques le Gouvernement de son côté tend à se concerter avec cette aristocratie nouvelle, et à consommer l’oppression du prolétariat.

De cela seul, en effet, que les puissances de la société ont été laissées par la Révolution à l’état inorganique, il résulte une inégalité de conditions qui n’a plus seulement, comme autrefois, sa cause dans l’inégalité naturelle des facultés ; mais qui se fait un nouveau prétexte des accidents de la société, et ajoute parmi ses titres, aux caprices de la nature, les injustices de la fortune. Le privilége, aboli par la loi, renaît ainsi du défaut d’équilibre : ce n’est plus un simple effet de la prédestination divine, c’est encore une nécessité de la civilisation.

Une fois justifié dans l’ordre de la nature et dans celui de la Providence, que manque-t-il au privilége pour assurer définitivement son triomphe ? de mettre les lois, les institutions, le Gouvernement, en harmonie avec lui-même : c’est à quoi il va tendre de toutes ses forces.