Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/42

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qui y a aussi sa part. La première de ces sources est que la guerre, amenée fatalement par la rivalité de deux états et la nécessité d’une incorporation, implique la mort morale de l’un de ces états. En raison même de l’attachement du citoyen à sa patrie, attachement qui lui faisait préférer la mort à la déchéance de son pays, on a étendu à l’homme l’arrêt de mort prononcé par la guerre contre l’état. Je n’ai pas besoin de montrer le vice de ce raisonnement ; je l’ai réfuté d’avance, par la distinction que j’ai faite du droit public et du droit des gens.

L’autre source est que la guerre est la revendication du droit de la force, droit reconnu par toute l’antiquité ; qu’une nation vaincue pouvait, en conséquence, être accusée d’avoir combattu contre le droit, ce qui, dans la rigueur, est un crime de mort. Ici, le faux du raisonnement provient de ce que la guerre étant nécessaire, non-seulement pour revendiquer, mais pour démontrer de quel côté est le droit de la force, on ne peut pas arguer de la défaite que le vaincu était coupable.

Voilà par quelle confusion s’est introduit ce prétendu droit de vie et de mort, dont tant de savants hommes parlent à tort et à travers, et que les gens de guerre pratiquent encore, bien qu’ils ne s’en vantent point ; et voilà par quels torrents de sang l’humanité paye l’oubli de ses principes les plus essentiels. Rétablissez le vrai sens du droit de la guerre, et, en supposant la continuation des hostilités, le carnage diminue partout des trois quarts. Vous pouvez vous en rapporter sur ce point à la conscience des militaires.

J’ai parlé plus haut de la maraude : le pillage n’est pas la même chose. La première a pour objet la subsistance du soldat ; on l’exerce en vertu du principe que la guerre doit nourrir la guerre. Le second est bien autrement ignoble et immoral ; il a pour but l’enrichissement du sol-