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race, continuellement écrémée, perd de sa taille et de sa vigueur, et la nation est atteinte dans sa souveraineté même.

Cette première infraction au droit de la guerre, identique sous ce rapport au droit politique, en amène une autre relative au choix des officiers et généraux.

Dans la guerre, encore plus que dans la paix, l’homme revêtu d’un commandement doit être à la nomination des citoyens. C’est le moins que l’homme qui s’arme pour la défense de son pays choisisse son capitaine : ainsi firent les fédérés de 92, et personne n’a prétendu que leurs officiers, produit de l’élection, fussent moins braves, moins capables, surtout moins amis de la liberté, que ceux qui plus tard formèrent la menue monnaie de l’empereur.

On observe à ce propos que l’élection, appliquée à l’armée, serait destructive de la subordination, sans laquelle une armée ne peut subsister ; qu’ainsi le droit du citoyen-soldat allant contre le but même de la guerre qui est le déploiement de la force, il y a lieu de faire plier le droit politique devant la discipline militaire.

Cette objection pourrait être vraie dans une monarchie où, l’armée étant distincte de la nation, la guerre laissée à la direction du prince, on voudrait conserver pour la nomination des officiers la forme républicaine. Il y aurait évidemment contradiction. La question alors serait de savoir si l’intérêt dynastique doit passer avant l’intérêt national, avant l’intérêt de la guerre elle-même, qui exige, comme l’industrie, pour le déploiement de la plus grande force, la plus grande liberté possible. Mais dans une république, dans un empire fondé sur le suffrage universel, où la nation garde le plein et entier exercice de sa souveraineté, où la guerre et la paix restent en définitive soumises à la décision du pays, l’exception n’est plus de mise. L’é-