Page:Proudhon - La Révolution sociale démontrée par le coup d’État du 2 décembre.djvu/86

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le quartier Saint-Marceau et la rue Mouffetard, on se fût attiré un méchant parti, en arrachant seulement un pavé. Ailleurs, le peuple fraternisait avec la troupe contre l’émeute et lui fournissait des vivres : on eût dit des compères du coup d’Etat. Des bourgeois, chiffonniers parvenus, fusillés par des soldats ivres jusque dans leurs foyers, n’en applaudissaient pas moins à la répression des brigands, dont le Constitutionnel et la Patrie leur racontaient les sinistres exploits. Dans quelques départements, si l’on en croit les relations officielles, le mouvement eut plus de gravité : cela tint à l’enrégimentation formée de longue main par les sociétés secrètes. Les paysans, en quelques endroits, étaient descendus sur la ville, avec leurs femmes et des sacs : ne dirait-on pas les hommes de Brennus ? Mais à peine la nouvelle se répand qu’à Paris les Rouges ont le dessous, ile les paysans se retirent et se prononcent pour Bonaparte. Le véritable Amphitryon est l’Amphitryon où l’on dîne ! Il n’y a pas de gens plus à leur aise, dans les moments critiques, que nos Sosies gaulois.

Étonnez-vous, après cela, des 7,600,000 voix données le 20 décembre à Louis-Napoléon. Oh ! Louis-Napoléon est bien réellement l’élu du peuple. Le peuple, dites-vous, n’a pas été libre ! le peuple a été trompé ! le peuple a eu peur ! Vains prétextes. Est-ce que des hommes ont peur ? est-ce qu’ils se trompent en cas pareil ? est-ce qu’ils manquent de liberté ? C’est nous, républicains, qui l’avons répété sur la foi de nos traditions les plus suspectes : La voix du Peuple est la voix de Dieu. Eh bien ! la voix de Dieu a nommé Louis-