Page:Proudhon - Les Confessions d'un révolutionnaire.djvu/220

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que ce ne sera ni par une transaction, ni par un éclectisme, ni par le sacrifice d’aucune idée, ni par aucun ajustement de forces et de contrepoids ; ce sera par l’élévation à leur plus haute puissance de tous les principes constitutionnels et sociaux actuellement en lutte : centralisation et séparation, suffrage universel et gouvernement, travail et crédit, liberté et ordre. Au premier abord, il semble que cette méthode doive accroître l’antagonisme : elle aura pour résultat de le faire cesser. Seulement, nous n’aurons plus cette distinction de constitution politique et de constitution sociale : le gouvernement et la société seront identifiés, indiscernables.


§ II[1].


Je dis donc que le vice de toute constitution, politique ou sociale, ce qui amène les conflits et crée dans la société l’antagonisme, c’est, d’un côté, et pour m’en tenir à la seule question que je veuille examiner en ce moment, que la séparation des pouvoirs, ou pour mieux dire, des fonctions, est mal faite et incomplète ; d’autre part, que la centralisation, ne respectant pas davantage la loi de spécialité, est insuffisante. D’où il suit que la puissance collective est presque partout sans action, et la pensée, ou le suffrage universel, sans exercice. Il faut pousser la séparation, à peine commencée, aussi

  1. J’ai donné dans l’Idée générale de la Révolution au xixe siècle, avec les principes et les formes de la constitution économique, la manière de résoudre, par la liquidation sociale et l’organisation des forces industrielles, le problème de l’annihilation du Gouvernement. Ce que j’ai voulu démontrer dans ce §, c’est que les principes de centralisation et de séparation, qui constituent le mécanisme politique, poussés dans toutes leurs conséquences, aboutissent également à la suppression absolue de l’État. En deux mots, tandis que dans l’Idée générale je montre la constitution économique se produisant de toutes pièces et se substituant à la constitution politique, en éliminant cette dernière, je me borne à faire voir, dans les Confessions, la constitution politique se transformant en constitution économique. — C’est toujours la même équation obtenue par des procédés différents.