Page:Proudhon - Les Confessions d'un révolutionnaire.djvu/223

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Au lieu de ce système, démocratique et rationnel, que voyons-nous ? Le Gouvernement, il est vrai, n’intervient pas dans les choses du culte ; il n’enseigne pas le catéchisme ; il ne professe pas au séminaire. Mais il choisit les évêques qui, sans rapport entre eux, et sans supérieurs, ne trouvent leur centre qu’à Rome, dans la personne du pape. Les évêques choisissent les curés et succursalistes, et les expédient dans les paroisses, sans la moindre participation du suffrage populaire, souvent même malgré le peuple. En sorte que l’Église et l’État, engrenés l’un dans l’autre, parfois se faisant la guerre, forment une espèce de ligue offensive et défensive en dehors du peuple, contre sa liberté et son initiative. Leur gouvernement cumulé, au lieu de servir le pays, pèse sur le pays. Il est inutile que je fasse ressortir les conséquences de cet ordre de choses : elles surgissent à tous les yeux.

Il faut donc, pour rentrer dans la vérité organique, politique, économique ou sociale, car ici c’est tout un : 1o Abolir le cumul constitutionnel, en ôtant à l’État la nomination des évêques, et séparant définitivement le spirituel du temporel ; — 2o centraliser l’Église en elle-même, par un système d’élections graduées ; — 3o donner pour base au pouvoir ecclésiastique, comme à tous les autres pouvoirs de l’État, le suffrage des citoyens.

Par ce système, ce qui aujourd’hui est gouvernement n’est plus qu’administration ; la France entière, quant à ce qui concerne les fonctions ecclésiastiques, est centralisée ; le pays, par le seul fait de son initiative électorale, se gouverne lui-même, aussi bien dans les choses du salut que dans celles du siècle ; il n’est plus gouverné. Que le culte extérieur doive être après cela maintenu ou supprimé : là n’est pas pour le moment la question. S’il se conserve, ce sera par l’énergie qui lui est intrinsèque ; s’il s’éteint, ce sera par le manque de vitalité : dans tous les cas, sa destinée,