Page:Proudhon - Les Confessions d'un révolutionnaire.djvu/93

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La majesté tranquille et le puissant repos, c’est-à-dire, l’abstention du peuple, l’obéissance du souverain. Sans cela vous aurez la révolution, avait dit M. Guizot ; sans cela vous n’aurez pas la révolution, disait Louis Blanc.

Comment donc prévenir la manifestation annoncée ? C’est Louis Blanc qui se pose ainsi la question. — Et s’il était vrai que des agitateurs inconnus voulussent faire sortir quelque orage du fond de la multitude mise en mouvement, comment déjouer leurs projets ? C’est encore Louis Blanc qui prévoit le cas. Des agitateurs ! s’écrie-t-il. M. Guizot disait : des factieux !

Le moyen proposé par Louis Blanc est à citer : il méritait d’être proposé à M. Guizot. La révolution aurait été détournée le 22 février, comme la dictature prétendue de Blanqui le fut au 17 mars.

Il fallait, dit Louis Blanc, accorder à la multitude ce qu’elle demandait, c’est-à-dire l’ajournement des élections (la seule chose dont il fût parlé dans la pétition des délégués), en y mettant pour condition l’intégrité du Gouvernement provisoire. — En deux mots, accepter la lettre de la pétition, et feindre de ne pas en apercevoir l’esprit ; accorder l’ajournement, ne fût-il que de quinze jours, et maintenir le gouvernement. Voilà comment Louis Blanc imagina de donner le change aux pétitionnaires. Une autre fois, quand le peuple se mêlera de pétitionner, il saura qu’avec le pouvoir il faut s’expliquer clairement et catégoriquement.

Mais pourquoi Louis Blanc, qui appuyait les motifs de la manifestation, qui les avait développés dans le conseil, qui les avait fait pénétrer dans les masses, répugnait-il si fort à mutiler le Gouvernement provisoire ? Était-ce par considération seulement et amitié pour ses collègues ? Pas le moins du monde. Écoutons l’historien :

« Ces dissidences, qui, au point de vue de l’unité d’ac-