Page:Proudhon - Les Malthusiens, 1849.djvu/6

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fixe, courtisans de tous les priviléges, panégyristes de tous les vices, parasites vivant aux dépens d’autres parasites, qui ne parlent tant de Dieu que pour dissimuler leur matérialisme, de la famille que pour couvrir leurs adultères, et qu’on verrait, par dégoût du mariage, caresser des guenons, s’ils ne trouvaient plus de malthusiennes.

Faites des filles, nous les aimons, chantent ces infâmes, en parodiant le poète. Mais abstenez-vous de faire des garçons : au banquet de la volupté, il n’y a pas de place pour tout le monde.

Le gouvernement était inspiré de Malthus, lorsqu’ayant cent mille ouvriers disponibles auxquels il donnait un salaire gratuit, il se refusait à les employer en travaux utiles ; — lorsqu’ensuite, après la guerre civile, il demandait pour eux une loi de transportation. Avec les dépenses des prétendus ateliers nationaux, avec les frais de guerre, de procédure, de prison, de transport, on pouvait donner aux insurgés du travail pour six mois, et changer tout notre régime économique. Mais le travail est un monopole ; mais on ne voulait pas que l’industrie révolutionnaire fît concurrence à l’industrie du privilége : au chantier de la nation, il n’y a pas de place pour tout le monde.

La grande industrie ne laisse rien à faire à la petite : c’est la loi du capital, c’est Malthus.

Le commerce en gros s’empare peu à peu du commerce de détail : c’est Malthus.

La grande propriété envahit, s’agglomère les plus pauvres parcelles : c’est Malthus.

Bientôt la moitié du Peuple dira à l’autre :

La terre et ses produits sont ma propriété ;

L’industrie et ses produits sont ma propriété ;

Le commerce et les transports sont ma propriété ;

L’État est ma propriété.

Vous qui ne possédez ni réserve ni propriété : qui n’êtes point fonctionnaire public, et dont le travail nous est inutile, allez-vous-en ! Vous êtes réellement de trop sur la terre, au soleil de la République, il n’y a pas de place pour tout le monde.

Qui viendra me dire que le droit de travailler et de vivre n’est pas toute la Révolution ?

Qui viendra me dire que le principe de Malthus n’est pas toute la contre-révolution ?

Et c’est pour avoir publié de telles choses, c’est pour avoir