Page:Proudhon - Manuel du Spéculateur à la Bourse, Garnier, 1857.djvu/513

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des paroles sinistres : Liquidation, Banqueroute, Révolution, sous l’impression desquelles nous ne voulons pas laisser nos lecteurs.

Certes, nous croyons à une transformation radicale de la société, dans le sens de la Liberté, de l’Égalité des personnes, de la Confédération des peuples : mais nous ne la voulons ni violente, ni spoliatrice. Il s’agit donc de trouver les voies et moyens : c’est par là que nous terminerons ce Manuel.

En donnant ainsi notre dernier mot, nous n’entendons préjuger en rien les événements. Nous n’avons pas mission de prévenir la lutte ; placé à la queue des partis, nous avons moins que personne la puissance de l’empêcher. Notre seul but, en concluant, est de décliner toute responsabilité dans une catastrophe, dont il n’aura pas tenu à nous que chacun n’ait eu la prévision.

De tout ce que nous venons de dire, une chose résulte claire comme le jour, irréfragable comme la nécessité : c’est que le travail ayant trouvé le secret de se commanditer lui-même, trouvant en lui-même sa puissance de circulation et son débouché, n’a plus que faire du crédit des privilégiés, de la direction d’une aristocratie, du protectorat d’un empereur ou d’un roi. Il répugne à ce système de restriction et de prélibations, qui trouva jadis sa raison d’être dans la barbarie des masses, dans leur résistance au travail, et les nécessités d’une initiation imposée de vive force.

Maintenant le travail est revendiqué universellement comme le plus précieux des biens, comme le premier des droits de l’homme. Autrefois, quand l’humanité, à peine dégrossie, refusait le service, le travail avait pour représentant, qui ? le maître. Il y avait une sorte de justice que le produit tout entier lui appartînt. Aujourd’hui les rôles sont changés : le vrai représentant du travail est le travailleur ; le spéculateur, le capitaliste, le propriétaire, le commerçant, l’entrepreneur, n’en est le plus souvent que le ténia. Un changement de régime est nécessaire.

Ce qui fait la base de toute entreprise industrielle, de toute spéculation mercantile ou financière, c’est la division du travail, le groupe ouvrier, la solidarité de la production