Page:Proudhon - Manuel du Spéculateur à la Bourse, Garnier, 1857.djvu/95

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tionnaire : force lui était de marcher avec le nouveau système.

On peut se faire une idée de l’importance de cette réforme par la comparaison des procédés.

En dépit de l’hypothèque, le crédit, dans les conditions anciennes, était moins réel que personnel. On prêtait ses capitaux, soit à des agriculteurs, soit à des industriels, dont la bonne foi, la capacité, l’expérience formaient encore pour le prêteur la plus sûre garantie. Aussi, que de lenteurs dans les informations, les expérimentations, les enquêtes !….. que de précautions dans les actes ! que de cérémonies par-devant le notaire ! que de difficultés soulevées par des droits des mineurs et des femmes !… Puis, une fois les fonds remis, le capitaliste ne pouvait plus se déprendre. Exiger un remboursement anticipé, c’était impossible : les termes du contrat s’y refusaient. Proposer une résiliation, c’était s’exposer à un sacrifice énorme : on compromettait l’entreprise, on ruinait l’emprunteur, on portait atteinte à sa fortune, au gage même du crédit !… Pour se dégager, le commanditaire ou prêteur était obligé de chercher un substitut dans ses droits, dont la confiance était à créer, et qui dans tous les cas prétendait à un émolument. De là nouvel examen, enquête, inventaire, débats : après bien des démarches, on n’arrivait à rien. Le capitaliste était rivé à l’hypothèque ; sa position était fixe, comme le capital qu’il avait fourni à l’entreprise. Pour lui, plus de délivrance avant l’heure solennelle du remboursement !…

Maintenant, grâce à la mobilité de l’action, le capital est délivré de toutes ces entraves, en même temps que l’emprunteur rencontre plus de facilités. Le crédit, entièrement dépersonnalisé, est devenu tout réel. On disait jadis : Tant vaut l’homme. On dit maintenant : Tant vaut la chose. Or, puisque l’on prête sur la chose, que fait le nom de l’homme dans le contrat ? Qu’importe le nom du commanditaire, celui du commandité, quand le talent, l’honorabilité, la vertu de celui-ci, quand les motifs qui font agir celui-là, peuvent tous se ramener à cette expression algébrique : Action-Capital-Bénéfice-Dividende ? On prête à l’entreprise, non au