Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 1, Garnier, 1850.djvu/180

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au même instant aux battements mesurés du tambour, perdent peu à peu leurs intervalles. Tout avance ; mais la distance de la tête à la queue s’allonge sans cesse ; et c’est un effet nécessaire du mouvement qu’il y ait des traînards et des égarés.

Mais il faut pénétrer plus avant encore dans l’antinomie. Les machines nous promettaient un surcroît de richesse ; elles nous ont tenu parole, mais en nous dotant du même coup d’un surcroît de misère. — Elles nous promettaient la liberté ; je vais prouver qu’elles nous ont apporté l’esclavage.

J’ai dit que la détermination de la valeur, et avec elle les tribulations de la société, commençaient à la division des industries, sans laquelle il ne pourrait exister ni échange, ni richesse, ni progrès. La période que nous parcourons en ce moment, celle des machines, se distingue par un caractère particulier ; c’est le salariat.

Le salariat est issu en droite ligne de l’emploi des machines, c’est-à-dire, pour donner à ma pensée toute la généralité d’expression qu’elle réclame, de la fiction économique par laquelle le capital devient agent de production. Le salariat, enfin, postérieur à la division du travail et à l’échange, est le corrélatif obligé de la théorie de réduction des frais, de quelque manière que s’obtienne cette réduction. Cette généalogie est trop intéressante pour que nous n’en disions pas quelques mots.

La première, la plus simple, la plus puissante des machines, est l’atelier.

La division ne faisait que séparer les diverses parties du travail, laissant chacun se livrer à la spécialité qui lui agréait le plus : l’atelier groupe les travailleurs selon le rapport de chaque partie au tout. C’est, dans sa forme la plus élémentaire, la pondération des valeurs, introuvable cependant selon les économistes. Or, par l’atelier, la production va s’accroître, et le déficit en même temps.

Un homme a remarqué qu’en divisant la production et ses diverses parties, et les faisant exécuter chacune par un ouvrier à part, il obtiendrait une multiplication de force dont le produit serait de beaucoup supérieur à la somme de tra-