Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 1, Garnier, 1850.djvu/221

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qué la limite des recherches dogmatiques, et forment un ensemble de doctrines au delà duquel il y a peu de chose à espérer. »

Facilité de parler, impuissance de raisonner, telle eût été la conclusion de Montesquieu, sur cet étrange panégyrique des fondateurs de l’économie sociale. La science est faite ! M. Reybaud en fait le serment ; et ce qu’il proclame avec tant d’autorité, on le répète à l’Académie, dans les chaires, au Conseil d’état, aux chambres ; on le publie dans les journaux ; on le fait dire au roi dans ses discours de bonne année, et devant les tribunaux, les réclamants sont jugés en conséquence.

La science est faite ! Quelle est donc notre folie, socialistes, de chercher le jour en plein midi, et de protester, notre lanterne à la main, contre l’éclat de ces soleils !

Mais, Messieurs, c’est avec un regret sincère et une défiance profonde de moi-même, que je me vois forcé de vous demander quelques éclaircissements. Si vous ne pouvez remédier à nos maux, donnez-nous au moins de bonnes paroles, donnez-nous l’évidence, donnez-nous la résignation.

« Il est patent, dit M. Dunoyer, que la richesse est infiniment mieux répartie de nos jours qu’elle ne l’ait jamais été. » — « L’équilibre des joies et des peines, reprend aussitôt M. Reybaud, tend toujours à se rétablir ici-bas. »

Quoi donc ! que dites-vous ? richesse mieux répartie, équilibre rétabli ! Expliquez-vous, de grâce, sur cette meilleure répartition ? Est-ce l’égalité qui vient, ou l’inégalité qui s’en va ? la solidarité qui se resserre, ou la concurrence qui diminue ? Je ne vous quitte pas que vous ne m’ayez répondu, non missura cutem… Car, quelle que soit la cause du rétablissement d’équilibre et de la meilleure répartition que vous signalez, je l’embrasse avec ardeur, et la poursuivrai jusqu’à ses dernières conséquences. Avant 1830, je prends cette date au hasard, la richesse était plus mal répartie : comment cela ? Aujourd’hui, selon vous, elle l’est mieux : pourquoi ? Vous voyez où je veux en venir ; la répartition n’étant pas encore parfaitement équitable, ni l’équilibre absolument juste, je demande, d’un côté, quel est l’empêchement qui dérange l’équilibre ; de l’autre, en vertu de quel principe