Page:Proudhon - Théorie de la propriété, 1866.djvu/135

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de toutes parts sur le sol quiritaire et se le partagent. La terre est assimilée à un butin, fractionnée en lots et tirée au sort : d’où le nom d’allod, lot, alleu. Aussitôt, comme par une inspiration supérieure, les conquérants renoncent à leur mode de possession traditionnel et adoptent le principe de propriété. En effet, chez les Germains, d’après Tacite, la terre, partagée selon les grades, restait à l’état de simple possession. « Agri, pro numero cultorum, ab universis per vices occupantur, quos mox inter se secundum dignationem partiuntut : facilitatem partiendi camporum spatia prœstant. Arva per annos mutant, et superest ager : nec enim cum ubertate et amplitudine soli labore contendunt, ut paucaria conserant, et prata separent, et hortos rigent : sola lerrœ seges imperatur. Unde annum quoque ipsum non in lotidem digerunt species ; hiems, et ver, et œstas intellectum et vocabula habent autumni nomen perinde ac bona ignorantur. »

L’empressement des conquérants à prendre les lois, les mœurs, les institutions et les arts de l’empire est remarquable à plus d’un titre : en ce qui concerne la propriété, il dénote la bonne foi des masses et la ferme conviction que cette forme de possession était supérieure à celle qu’ils avaient pratiquée jusque-là. L’antique propriété avait été subalternisée, travestie par le régime impérial[1]  ; l’occupation par la conquête

  1. La propriété chez les barbares une fois établis est moins absolue que chez les Romains ; le droit de famille est distinct de la puissance paternelle, et si le propriétaire peut disposer souve