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Page:Proudhon - Théorie de la propriété, 1866.djvu/138

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s’empressaient de se recommander aux abbés et aux évêques.

Charlemagne, comme prince du temporel, résiste à ce mouvement et le dénonce dans ses Capitulaires. Mais lui-même se contredit : tandis qu’il tonne contre les clercs qui accaparent la terre, sous prétexte de la restituer au Seigneur, et convertissent les alleux en bénéfices, il multiplie le plus qu’il peut, dans la sphère de son action, ces mêmes bénéfices, et éclate en menaces contre les nobles qui, par une rubrique de légiste, après avoir aliéné le bénéfice royal, le rachètent comme un alleu dans l’assemblée du canton. Défenseur de la liberté et du progrès vis-à-vis de l’Église, Charlemagne, faisant, au moyen des bénéfices, de la centralisation à sa manière, se montre rétrograde vis-à-vis de ses guerriers. Son système est un vaste communisme, rival de celui de l’Église, mais qui n’exista qu’en ébauche et s’écroula avec lui. Du reste, tout le monde faisait de cette bascule. La mort de Charlemagne fut tout à la fois le signal du triomphe des grands bénéficiers, demandant à la royauté l’indépendance et l’hérédité, c’est-à-dire la conversion dit bénéfice en alleu, et de la défaite des petits propriétaires, dont les alleux furent convertis par les grands bénéficiers devenus grands propriétaires, en fiefs. Charlemagne n’a réellement fondé que la théocratie papale, laquelle a duré aussi longtemps que la foi des peuples l’a soutenue.

Sans doute il se mêle dans cette pétition de la propriété beaucoup d’égoïsme, beaucoup d’indiscipline,