Page:Proudhon - Théorie de la propriété, 1866.djvu/175

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opérée par la vertu magique de ce seul mot, la PROPRETÉ. C’est ainsi que notre espèce s’est élevée du régime inférieur de l’association patriarcale et de l’indivision terrienne à la haute civilisation de la propriété, civilisation à laquelle nul ne peut avoir été initié, et vouloir après rebrousser chemin. Qu’on se figure ce qui arriverait si tout à coup, la propriété abolie, la terre partagée à nouveau, défense était faite à toits possesseurs fonciers de vendre, échanger, aliéner leur lot ; si, dis-je, le sol était de nouveau, et pour tout de bon, immobilisé ! N’est-il pas vrai que le possessionné, bien que travaillant pour lui seul et ne payant plus de rente, se croirait rattaché comme autrefois à la glèbe ?… Je laisse au lecteur à approfondie ce que je ne fais ici que lui indiquer.

Un autre attribut, autre abus de la propriété, est dans la faculté reconnue au propriétaire de disposer de 1a manière la plus absolue. Passe pour les produits du travail et du génie ; passe pour ce qu’il est permis d’appeler les créations propres de l’homme ; mais pour la terre, rien, ce semble, n’est plus contraire à toutes les habitudes légales et contractuelles. Le souverain qui fait une concession de mine, par exemple, le propriétaire qui afferme son fonds ou qui le lègue en viager, ne manquent jamais l’un et l’autre d’imposer certaines conditions au concessionné, au fermier, au donataire. Il devra conserver la chose, exploiter en bon père de famille, etc. Ici la seule condition imposée est celle de l’abbaye de Thélème, de faire à sa volonté.