Page:Proudhon - Théorie de la propriété, 1866.djvu/177

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prescrire l’abstinence, donner des recettes amoureuses et faire un art de l’amour conjugal ? Non : la loi du mariage étend un voile sur le lit nuptial. Elle impose aux conjoints la fidélité et le dévouement ; elle défend au mari d’arrêter son regard sur la femme et la fille de son prochain ; à la femme de lever les yeux sur l’étranger ; elle les rappelle au respect d’eux-mêmes, et puis les abandonne à leur propre discrétion. Qu’ils aillent maintenant dans la mutualité de leur tendresse, soucieux du droit d’autrui et de leur propre dignité, et ce sera sur l’amour transfiguré par la Justice que s’élèvera l’édifice inébranlable de la famille ; ce sera par lui que la femme, impudique et provocatrice par nature, deviendra sainte et sacrée.

Ce que nous venons de dire de l’amour est également vrai de l’art et du travail. Cela ne signifie point que les œuvres du génie, les travaux de l’industrieux, ne connaissent ni règle ni mesure, ni rime ni raison : à cet égard, l’école romantique a complètement fait fausse route. Cela veut dire que les opérations de l’industriel, de l’artiste, du poète, du penseur, bien que soumises à des principes, à des procédés techniques, excluent, de la part de l’autorité publique, comme de l’Académie, toute espèce de réglementation, ce qui est fort différent. Liberté, telle est ici la. vraie loi : en quoi je suis de, l’avis de M. Dunoyer et de la plupart, des économistes.

J’ajoute qu’il en doit être de la propriété comme de l’amour, du travail et de l’art. Non pas que le propriétaire doive s’imaginer qu’il est ait-dessus de toute raison et