Page:Proudhon - Théorie de la propriété, 1866.djvu/19

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Du temps immémorial, la Sologne, par exemple, était citée comme une contrée maudite, aride, sablonneuse, marécageuse, insalubre autant qu’infertile ; des garennes, quelques étangs poissonneux, des landes, des ajoncs, de maigres pâtis pour les moutons, dont la dent ronge l’herbe jusqu’à la racine, de rares champs de sarrasin et autres cultures inférieures, quinze ou vingt hectares (la superficie pour faire vivre une famille : telle était la condition de ce triste pays. Depuis une vingtaine d’années, l’attention de cultivateurs capitalistes a été attirée de ce côté ; ils se sont dit qu’avec les chemins de fer, il serait possible d’une part d’amener sur les terres solognotes les éléments qui leur manquent : plâtre, chaux, engrais, immondices fécondantes des grandes villes, fumiers des casernes, etc. ; d’autre part, que les produits agricoles qu’ils obtiendraient auraient leur placement tout trouvé par les mêmes moyens de circulation. Que faire ? Acheter des terres et constituer d’immenses domaines ? Mauvaise spéculation au point de vue du but qu’il s’agissait d’atteindre. Celui qui, ayant 100, 000 francs, en immobilise 50,000 dans l’acquisition du fonds, n’a plus que 50,000 francs à consacrer à l’amendement et à la main-d’œuvre ; il diminue de moitié ses moyens d’action. Aussi, au lieu, d’acheter le fonds, les nouveaux colons contractèrent des baux de trente, quarante et cinquante ans. L’exemple fut suivi, et la Sologne est aujourd’hui en voie de transformation, disons mieux, de création : dessèchements, assainissement, plâtrage, chaulage, marnage, fumure, plantations