Page:Psichari - Le Voyage du centurion (1916).djvu/110

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de la nuit qui ne retranche à ses yeux que le pur néant du désert. Les tirailleurs forment sur le sol une figure géométrique qui ne respire plus ni ne bouge plus. Il y a seulement quelques Maures qui causent autour d’un feu, et la sentinelle qui se profile des pieds à la tête sur le ciel, comme une image. Près de lui, il entend le bruit des chameaux qui ruminent, et parfois l’un d’eux s’arrête, et il allonge, en un mouvement de lassitude, son long col sur la terre refroidie. Tableau commun et familier ! Il avait vingt-deux ans, Maxence, quand, pour la première fois, il connut l’amère douceur de ces campements d’un soir, dont on est sûr que rien, dans la mémoire fragile, ne subsistera, et dont pourtant le charme replié finit par obséder toute la vie. Et voici que cette halte à la vesprée est toute semblable à la première halte. Tout paraît charmant à cette tête jeune. Il caresse sa chienne.