Page:Quevedo - Don Pablo de Segovie.djvu/104

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qu’il y ait quelques personnes qui exercent cet art, pourvu qu’elles aient une lettre d’examen des caciques des poètes qui se trouveront dans la même contrée, enjoignant néanmoins aux poètes des bateleurs de ne point finir les intermèdes par des coups de bâton ou par des diables, ni les comédies par des mariages ; et à ceux des aveugles de ne point placer les événements à Tétuan, ni de faire usage des mots cher frère et en l’honneur ; nous leur défendons en outre de ne jamais parler mal du présent ouvrage ; et à ceux des sacristains d’introduire dans leurs cantiques ni Gil ni Pascal, de mettre des termes équivoques et d’employer des pensées communes qui conviennent à chaque fête en changeant le nom. Enfin nous enjoignons à tous les poètes en général de se détacher de Jupiter, de Vénus, d’Apollon et des autres dieux, sous peine de les avoir pour avocats à l’heure de leur mort.


Cette pragmatique parut charmante, autant qu’il est possible de le dire, à tous ceux qui en entendirent la lecture, et chacun d’eux m’en demanda une copie. Le sacristain seul commença à jurer par les vêpres solennelles, par l’Introïbo, par les Kyrie, que c’était une satire contre lui à cause de ce qu’elle contenait au sujet des aveugles, et il ajouta qu’il savait mieux que personne ce qu’il avait à faire. Enfin il dit qu’il avait logé dans la même maison que Lignan, qu’il s’était trouvé aussi proche de Lope de Véga qu’il l’était de moi, qu’il avait vu mille fois Don Alonzo de Ercilla, qu’il avait chez lui le portrait du divin