Page:Quevedo - Don Pablo de Segovie.djvu/195

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jamais rien tant à cœur que de leur rendre service partout, autant qu’il me serait possible. Don Diégo me fit des excuses et me demanda pardon de m’avoir pris pour le fils du barbier. Il ajouta : « Vous auriez peine à croire que sa mère était sorcière, son père fripon, son oncle bourreau, et lui le plus grand maraud et l’homme du monde qui avait les plus mauvaises inclinations. » Que ne devais-je pas sentir en entendant dire de moi et à moi-même des choses si humiliantes ? Quoique j’usasse de dissimulation, j’étais comme sur un brasier. On parla de retourner à la ville et nous prîmes congé des dames, les deux chevaliers et moi.

Don Diégo monta dans la voiture avec ses parentes et leur demanda pourquoi ce goûter, et par quel hasard elles se trouvaient là avec moi. La mère et la tante lui dirent que j’étais un homme qui avait un majorat de quarante mille ducats de rente, qu’elles voulaient marier Nanette avec moi, qu’il n’avait qu’à faire des informations et qu’il verrait que c’était une chose non seulement très convenable, mais encore très honorable pour toute la famille. Ils s’entretinrent ainsi de moi jusqu’à la maison de ces dames, laquelle était située dans la rue qui conduit de l’Arénal ou place des Sablons à San Felipe.

Les deux chevaliers m’emmenèrent avec eux comme la veille. Arrivés à la maison, ils me proposèrent de jouer, dans la vue de me plumer. Je compris leur intention et je m’assis. Ils tirèrent des cartes et nous nous mîmes au jeu. Ils faisaient le pâté, et je