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SOUVENIRS AUTOBIOGRAPHIQUES

cette Société. Au contraire, la Société fut parvenue certainement à surprendre et maîtriser le gouvernement, si elle n’avait pas été contre-minée par la perfidie d’un frère en qui on avait confiance. Un moyen que les Irlandais unis employèrent pour répandre les nouvelles, mérite d’être mentionné, parce qu’il peut s’appliquer à n’importe quelle cause, et qu’on peut en tirer un parti bien plus grand dans un siècle où tout le monde aura appris à lire. Ils imprimaient des journaux sur un seul côté de la feuille, que l’on pouvait ainsi utiliser en la collant contre les murs. Cet expédient avait été peut-être suggéré par Paris, où l’on affichait fréquemment des journaux de ce genre, et presque toujours pour pousser à quelque sanglant massacre. Mais Louvet, dans ses Mémoires, mentionne un autre journal qu’il dirigeait lui-même d’après de meilleurs principes ; il était imprimé aux frais du public, et parfois plus de vingt mille exemplaires d’un même numéro étaient placardés au coin des rues. Ce journal avait pour titre la Sentinelle, les lecteurs qui connaissent les Mémoires de madame Roland se rappelleront qu’elle cite le journal de Louvet comme un modèle pour tous ceux de son genre. L’Union Star (l’Étoile de l’Union) fut le jour que publièrent sur ce plan les Irlandais unis, l’Étoile du Nord (Northern Star) et la Press, journaux antérieurs, qui paraissaient sous la forme ordinaire, ayant été détruits violemment par le gouvernement. L’Union Star, il faut bien le reconnaître, ne se préoccupait guère d’élever le peuple, en développant son intelligence, elle se bornait à faire un violent appel à ses passions contre tout ce qui avait encouru le déplaisir de la société