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DU MANGEUR D’OPIUM

lecteur, que dans le temps dont je parle, et dans le sens où je veux parler, il y avait de la boue dans toute l’Angleterre.

Le lendemain, je traversai la campagne jusqu’à Stamford, en une étape de neuf milles, et j’arrivai à L—xt—n.

Là je fis un séjour qui fut le moment le plus heureux de ma vie d’enfant. Je me trouvais de nouveau chez un gentilhomme irlandais. Par conséquent, ma position, au point de vue des amusements et de la liberté dont je jouissais dans l’emploi de mon temps, était, peut-on supposer, fort analogue à celle que je venais de quitter en Irlande. En réalité elle était fort différente. Lord C—rb—ry était ce qu’on appelle communément, et avec une nuance de dédain, un chasseur de renards. Mais les chasseurs de renard, en tant que classe, ne sont point les personnages méprisables que l’on pourrait s’imaginer d’après des croquis satiriques. Du moins mon expérience personnelle me les a montrés tout autres. Il est toujours avantageux pour le caractère d’un homme, et il n’en résulte aucun inconvénient pour ses qualités intellectuelles, quelles qu’elles soient, qu’il se trouve entraîné à un exercice rude, et continuel. Il n’y a rien qui débarrasse plus efficacement un homme de l’irritation corporelle qui résulte d’habitudes sédentaires et par suite il n’y a rien de mieux approprié pour donner un entrain soutenu, de l’animation, de la bonne humeur. Quant à des effets nuisibles, il est difficile de voir en quoi la pratique de la chasse