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DU MANGEUR D’OPIUM

Petworth)[1], c’était donc une route soignée. J’ai grande raison de croire que le plus grand nombre des routes de l’Angleterre ressemblaient à celle-là, à moins qu’elles ne passassent sur les lits rocheux qui s’étendent dans le Nord, depuis le Derbyshire jusqu’au Cumberland et au Northumberland.

Les voitures publiques furent les premiers avant-coureurs d’une amélioration ; à mesure qu’elles se développaient et prospéraient, les progrès se dessinaient sur la carte en minces lignes. Et le Parlement se mit à montrer son zèle, quoique ce ne fût pas toujours un zèle éclairé, en légiférant à tort et à travers sur la largeur des jantes de roues, etc. Mais ce fut seulement quand commença à s’épanouir notre industrie cotonnière, quand nos machines industrielles et à vapeur commencèrent à encourager l’exploitation de la houille, qui à leur tour les stimula, qu’on s’occupa avec quelque énergie de nos routes. En mon enfance, alors qu’un ou deux de mes frères et sœurs et moi, nous nous tenions debout à la glace de devant, dans la voiture de ma mère, je me rappelle qu’un ensemble invariable d’objets se présentait à mes yeux. Le postillon, — car toutes les voitures étaient ainsi conduites, — était occupé non point par accès et par boutades, mais sans cesse, éternellement, à ce qui se nommait quartering, c’est-à-dire à louvoyer de droite à gauche, selon l’état du sol. Jusqu’alors on avait parcouru sur une certaine longueur une ruelle

  1. Jeu de mots intraduisible. Le mot de Pet qui sert d’épithète à road (route) et de préfixe à Petworth, nom de localité, signifie isolément animal, objet, séjour favori. (Note du Traducteur.)