Page:Quincey - Souvenirs autobiographiques du mangeur d’opium, trad. Savine, 1903.djvu/54

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que sa récente histoire, en fit un personnage très intéressant pour les femmes. À cette heure encore c’est un mystère pour moi que dans toutes les distributions de marques d’honneurs, Sir Sidney Smith ait été laissé de côté. Dans la Méditerranée, il se fit bien des ennemis surtout parmi les gens de sa profession, qui avaient l’habitude de parler de lui comme d’un trop beau monsieur, trop au-dessus de son état. Il est certain qu’il préférait se battre sur terre, comme à Acre. Mais quoi qu’il en soit, l’homme dont Napoléon ne pouvait jamais prononcer le nom sans un mouvement de dépit, doit avoir rendu de bons services. Et à cette époque il n’y avait, entre lui et la défunte reine Caroline, aucune relation, quelle qu’en fût la nature. En somme, pour moi, son affaire me paraît inexplicable.

Vers cette époque, je vis pour la première fois une personne dont je fis plus tard la connaissance, qui m’intéressa bien plus et qui était en effet aussi extraordinaire que n’importe qui de mes contemporains, je veux dire le célèbre Stewart le Marcheur[1].

Je fus retiré de l’école de grammaire de Bath à la suite d’un accident qui fit d’abord croire à une fracture du crâne, et l’habile chirurgien qui me

  1. John Stewart (1749-1822). Quincey lui a consacré un article du Tait’s Magazine en octobre 1840. Ancien commis de la compagnie des Indes, passé au service du nàbab d’Arcot dont il devint le premier ministre, Stewart avait parcouru l’Inde et la Perse, l’Abyssinie et l’Éthiopie, la France et l’Espagne avant de rentrer en Angleterre. Il y avait en 1798 une réputation d’excentricité. Il y donnait des lectures habillé en arménien, recevait à dîner des amis de choix dans des salons décorés à la chinoise. Il mourut en novembre 1822. Stewart laissait un grand nombre d’écrits anonymes. (Note du traducteur).