Page:Quincey - Souvenirs autobiographiques du mangeur d’opium, trad. Savine, 1903.djvu/78

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
55
DU MANGEUR D’OPIUM

dans le problème qui se présentait actuellement : le temps dont nous disposions et ce que nous pouvions en faire. Nous avions à voir Londres ; pouvions-nous le faire d’une manière aussi approximative que l’étudiant cité par Hiéroclès, en emportant une brique dans notre poche ?

Nous perdîmes une demi-heure à discuter sur le sujet, mais nous parvînmes à le réduire à l’alternative entre l’Abbaye de Westminster et la cathédrale de Saint-Paul. Je ne crois pas que nous eussions pu choisir mieux. Les deux édifices en balance, à ce que nous dit le garçon, étaient à égale distance de notre auberge, mais ils étaient trop éloignés l’un de l’autre pour que nous puissions les visiter tous deux. Nous décidâmes donc de résoudre la question en tirant à la courte paille. La courte paille fut pour l’abbaye. Mais comme ni l’un, ni l’autre n’était content de ce jugement, nous résolûmes de faire un nouvel appel à la sagesse du hasard, attendu que la seconde idée est la meilleure. Cette fois ce fut la cathédrale qui fut désignée, et ainsi il se fit que pour nous, la visite de Saint-Paul équivalait à avoir vu Londres.

Le premier coup d’œil jeté sur Saint-Paul, comme on le pense bien, nous frappa d’un étonnement respectueux, et à cette époque-là je ne m’imaginais pas que le sentiment de la grandeur pût s’imprimer plus profondément. Une seule chose nous gâta en partie notre plaisir. Cette chose-là était un détail qui paraissait sans importance, et qui en serait réellement un, si l’on s’y prenait autrement. Les superbes objets de curiosité que contient la cathédrale étaient montrés, moyennant un tarif spécial pour chacun d’eux. Ils étaient, je crois, au nombre de sept, et on pouvait voir pour quelques pence