sa tête une couronne ; quand il s’arrête dans le désert, tous les lions se taisent.
Troisième Tribu.
Je connais un guide qui court plus vite que le
fleuve, qui sait plus de choses que le griffon :
c’est l’ibis au bec d’or, aux pieds d’argent.
Quand il se repose sous les palmiers, il
prophétise l’avenir ; quand il se traîne sur un
rocher, il se rappelle le passé.
(ils partent.)
Première Tribu.
Fleuve du Gange, tu cours plus vite que la
gazelle. Arrête un moment tes flots pour que
nous y étanchions notre soif.
Le Fleuve.
Pas encore, pas encore ; nous sommes encore loin du
bord où vous vous reposerez. Avec mon onde qui me
suit, je roule un lis blanc comme un vase ; dans
le lis blanc est le breuvage de l’ammirééta qui
donne l’immortalité. Vous en approcherez vos
lèvres quand nous serons arrivés.
Première Tribu.
Dis-nous au moins, avec tes îles murmurantes,
dis-nous, avec ta blanche écume, comment sera
le bord où nous nous arrêterons.
Le Fleuve.
Sous des figuiers d’Inde et des pamplemousses, j’ai
déjà creusé ma vallée pour que vous y répandiez
vos flots. Comme je la remplissais chaque jour de
l’eau de ma source, vous la remplirez, vous, à
votre tour, de larmes, de sueur, d’hymnes et de
tombeaux. Votre nom germera dans les siècles
comme le lotus germait dans mon limon. Vos
dieux s’amasseront autour de vous, semblables aux
coquillages de mes bords. Dans vos songes ils
s’épanouiront comme le fruit de l’amlaka par
une nuit d’automne.
Première Tribu.