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préface.

La raison des sobriquets n’est pas moins intéressante à connaître et à expliquer. Les sobriquets donnés à des villes, à certaines classes d’hommes, à certaines factions politiques font partie de l’histoire des mœurs et des coutumes. Ils dessinent en quelque sorte la physionomie des diverses époques, en résumant, par des dénominations bizarres, mais expressives, le tour d’esprit et les usages particuliers des différents peuples. Ils n’ont, du reste, ni le même intérêt, ni la même portée que les proverbes. Remarquons, en passant, que notre temps est fertile en sobriquets qui trouvent de l’écho, tandis qu’il n’a peut-être pas produit un proverbe que l’usage général ait consacré. C’est que le proverbe appartient aux époques synthétiques où l’union d’un peuple se fonde sur la communauté d’idées et de sentiments généralement admis, de traditions reconnues et acceptées, qui rapprochent les hommes par le doux lien des habitudes identiques et de la sympathie. Le sobriquet, au contraire, semble appartenir plus particulièrement aux époques de confusion et de désordre. Il sert comme d’étiquette aux passions politiques ; il classe et divise les hommes en catégories. En un mot, on peut le considérer comme un symptôme de l’anarchie intellectuelle, du morcellement des partis et de l’éparpillement des idées. Notre époque ne pouvait donc manquer d’être fertile en sobriquets.

Revenons aux proverbes. L’étude aujourd’hui en est fort négligée, comme le sont presque toutes les études qui n’ont pas une valeur commerciale et industrielle. Notre siècle, sous prétexte de positivisme (mot barbare créé de nos jours et bien digne de ce qu’il exprime), semble avoir abandonné le culte de l’intelligence et la recherche des choses spirituelles pour se livrer spécialement aux soins